Présidentielles 2017 : 5 propositions pour faire bouger l’écosystème de l’orientation

Paris, le 15 septembre 2016

5 propositions pour faire bouger l'écosystème de l'orientation, afin de privilégier un choix de métiers plutôt que de formations, favoriser la mixité des filières et renforcer la féminisation des secteurs industriels et technologiques !

Présidentielles 2017 : 5 propositions pour faire bouger l’écosystème de l’orientation

Depuis 10 ans, Elles bougent et ses partenaires s'engagent pour faire découvrir aux jeunes filles les filières scientifiques et techniques en manque de talents féminins. Issues de son expérience de terrain, au croisement des mondes de l'entreprise, de l'éducation et de l'enseignement supérieur, les propositions d'Elles bougent ont l'ambition d'accélérer le mouvement de la mixité dans les métiers de l'industrie et du numérique.

Près de 200 actions sont menées chaque année par les marraines Elles bougent, avec à la clé, depuis 10 ans, des résultats très positifs incarnés par de belles histoires de parcours de réussite pour les jeunes filles rencontrées par l'association.

En 10 ans, le taux de féminisation des effectifs, dans les établissements d'enseignement supérieur préparant aux métiers de technicien-ne et d'ingénieur-e comme dans les entreprises industrielles et technologiques a évolué positivement. Mais cette progression reste encore lente et insuffisante. En 2016, l'enjeu est de taille : la désaffection des filières scientifiques perdure, aboutissant à un manque d'ingénieurs en France. Alors que la parité existe en Terminale S, seulement 10% des bachelières de la filière S choisissent des études de techniciennes ou d'ingénieures, contre 30% des garçons.

Il est nécessaire et urgent d'aller plus loin. Cinq voies de refonte de l'écosystème de l'orientation sont identifiées par l'association. Elles s'appliquent bien sûr aux métiers d'ingénieur-e et de technicien-ne mais, plus généralement, peuvent bénéficier à l'ensemble des filières et métiers.

1 - Se baser sur des envies plus que des notes, pour choisir des métiers plus que des formations, au moment de l'orientation !

Aujourd'hui, nous constatons que l'orientation est basée essentiellement sur les résultats scolaires. Elle se fait souvent par élimination plus que par choix et l'élève choisit avant tout un cursus de formation, plutôt qu'un métier.

Aussi, il s'agit pour Elles bougent de susciter des vocations pour des secteurs d'activité et leurs métiers, la formation étant le moyen pour y accéder. Pour cela, il faut développer une meilleure connaissance des métiers par les élèves. La rencontre sur le terrain avec des role models, comme c'est le cas des Marraines Elles bougent, permet aux élèves de trouver leur fibre, leur vocation par identification et projection dans ces femmes qui témoignent de façon dynamique et enthousiaste de leur métier-passion. C'est cette motivation qui permettra ensuite à l'étudiant-e de réussir, même dans des cursus de formation exigeants. D'autant plus que les filières techniques sont accessibles par plusieurs voies, souvent méconnues.

La proposition n°1 consiste donc à multiplier les rencontres entre élèves et personnes en activité, très en amont de l'orientation, afin de donner une vue très large de la palette des métiers, pour finalement susciter des vocations par projection et identification avec un ou plusieurs role models.

2 - Un module d'ouverture au projet professionnel du collège au lycée, sur temps scolaire, pour permettre un réel accompagnement de l'élève

La découverte des métiers et la question de l'orientation doivent être des sujets récurrents pour l'élève du collège au lycée, lui permettant progressivement de cheminer dans ses réflexions sur son futur métier. De véritables créneaux obligatoires doivent être consacrés à la construction du projet professionnel, du collège jusqu'à la terminale, encadrés par des coordinateurs qui pourront s'appuyer sur un réseau d'experts et de professionnels pour présenter aux élèves, à partir d'exemples concrets, la diversité des métiers. Il s'agit également de renforcer les séquences d'observation pour permettre aux élèves de découvrir pendant leur formation plusieurs métiers, plusieurs secteurs, plusieurs services d'une même entreprise. Ce module pourrait être géré sous cotutelle du Ministère de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, et de celui du Travail, de l'Emploi et de la Formation professionnelle, ou celui des Finances et de l'Economie, ces derniers permettant la connexion directe avec la réalité professionnelle, mais aussi avec le monde bien tangible des différents métiers, de l'économie, des secteurs innovants etc.

3 - Les parents comme alliés

On constate que les jeunes femmes qui s'orientent vers les filières scientifiques et techniques bénéficient souvent de milieux propices, à savoir des proches ingénieurs et/ou enseignants. On sait combien les parents ont un rôle de prescripteur pour leurs enfants (cfr. études Elles bougent/CSA de février 2016, en annexe). Or, ceux-ci se sentent souvent démunis et angoissés face à cette responsabilité, faisant appel à leurs propres souvenirs d'orientation, désormais obsolètes ou incomplets. D'où l'importance pour l'association de travailler avec eux pour les informer sur la réalité des métiers d'aujourd'hui et de demain, les rassurer et leur permettre de dépasser eux-mêmes leurs propres représentations et stéréotypes sur les métiers et filières.

Le 8 mars 2017, pour la première fois, Elles bougent dédiera l'un de ses grands rendez-vous annuels à des visites parents-filles.

La proposition n°3 consiste donc à institutionnaliser des journées annuelles dédiées à l'orientation pour les élèves et leurs parents.

4 - Le Docteur House de la technologie au féminin

On sait combien certains programmes tv ou web - séries, films, pastilles, émissions/concours - influencent les représentations liées à des métiers avec un impact majeur sur les vocations pour ces métiers. C'est le cas d'émissions comme MasterChef ou Top Chef pour les métiers de l'hôtellerie/restauration, de séries policières pour la criminologie et la police scientifique ou des séries type Urgence pour les carrières médicales. Tous ces programmes ont fait exploser les vocations pour les secteurs qu'ils mettent en lumière. Les médias ont un rôle à jouer pour faire évoluer les représentations des métiers auprès du grand public alors que très peu de métiers aujourd'hui sont mixtes. Elles bougent interpelle les chaines de télévision pour qu'elles commandent et diffusent ce genre de programme et prêtera son concours aux sociétés de production pour les aider à relever ce défi. Si l'on veut sensibiliser l'ensemble de l'écosystème de l'orientation – parents, enseignants, élèves etc. – il est fondamental de ne négliger aucune piste et de s'appuyer sur des canaux solides et avérés.

5 - Légiférer pour permettre aux établissements de favoriser la mixité dans les systèmes d'admission

Pour Elles bougent, il est plus que nécessaire de revoir les règles des systèmes d'admission pour équilibrer le nombre d'admis en fixant un ratio de progression de 10% sur le nombre d'élèves du sexe le moins représenté, chaque année. Concrètement pour 10 filles en année N dans une filière essentiellement masculine, ou 10 garçons dans une filière majoritairement féminine, l'objectif serait d'en avoir 11 (+10%) en année N+1 etc. Il s'agit d'appliquer un bonus au sexe le moins représenté dans le but, en première étape, d'atteindre, sous 5 ans, un quota de 30% minimum du sexe le moins représenté.

Pour cela, il faut fixer un cadre légal autorisant cette pratique. On peut prendre comme modèle la loi Copé-Zimmermann du 27 janvier 2011 relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d'administration et de surveillance et à l'égalité professionnelle. Cette loi, très discutée au moment de sa mise en application, est maintenant reconnue par l'ensemble des parties prenantes comme une loi pragmatique, efficace et qui, sans elle, n'aurait pas permis une arrivée rapide des femmes dans les conseils d'administration.

Légiférer sur le sujet d'une inscription plus équilibrée entre hommes et femmes dans les fillières de formation, permettrait d'agir en catalyseur de la mixité dans les établissements puis dans les métiers, et d'envoyer un signal fort à l'ensemble de la société.