Françoise : "Dire aux filles que la voie scientifique leur est ouverte"

Publié le 18 octobre 2018

Professeure de mathématiques au Lycée général et technologique Félix Le Dantec, à Lannion (22), Françoise Garlet coordonne les Sciences de l'Ingénieur au Féminin pour l'Académie de Rennes. Elle nous présente les enjeux de cette journée, co-organisée avec l'UPSTI, dont la prochaine édition se déroulera le 29 novembre 2018 dans 300 collèges et lycées, en France et à l'étranger.

Françoise Garlet, professeure de mathématiques au Lycée Le Dantec à Lannion, nous présente la journée des Sciences de l'Ingénieur au Féminin 2018, avec Elles Bougent et l'UPSTIBonjour Françoise. Pouvez-vous nous expliquer les raisons de votre engagement pour cette journée ?

Quand on regarde le nombre de lycéennes en terminale S (à peu près en nombre égal à celui des garçons), le faible nombre d'étudiantes dans les écoles d ingénieurs ne peut qu'interpeller. Que s'est-il passé et qu'elle est l'origine de cette disparité ? Cette journée est donc une excellente occasion de travailler avec les lycéennes à leur orientation et de leur dire que cette voie leur est ouverte !

300 établissements scolaires se sont d'ores et déjà inscrits à cette 6e édition. Rennes est l'académie qui compte le plus de collèges et lycées participants (41). Comment expliquez-vous ce succès dans votre région ?

De part les traditions et l'histoire de la Bretagne, la place de la femme est une question importante. Et bien sûr, sans faire preuve de chauvinisme, cela prouve le dynamisme de notre région !

Vous êtes enseignante et co-déléguée régionale Elles bougent en Bretagne. Quel regard portez-vous sur l'évolution des choix d'orientation des lycéennes vers les filières scientifiques et techniques ?

Il me semble qu'il y a une évolution positive, même si pour l'instant les chiffres ne sont pas satisfaisants. Au Lycée Le Dantec, où j'enseigne les mathématiques, la présence des filles en Terminale S avec Sciences de l'ingénieur était anecdotique au début. Maintenant, les filles représentent 30% des effectifs et je pense que c'est en grande partie grâce à toutes les actions engagées par des associations comme Elles bougent, à l'image de cette journée nationale des SI au Féminin. Petit bémol néanmoins, il y a toujours très peu de filles dans les BTS industriels…

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Françoise : "Encore beaucoup de clichés à détruire"

Pensez-vous que les mentalités sont en train de changer sur la place des filles vers les carrières d'ingénieures et techniciennes ?

Je trouve que l'évolution est lente. Pour beaucoup de parents, le métier d'ingénieur.e rime avec technologie, un univers qui ne serait "pas fait pour une fille". Il y a encore beaucoup de clichés à détruire et il ne faut pas relâcher notre vigilance.

Le Lycée Le Dantec s'apprête à participer aux Sciences de l'Ingénieur au Féminin pour la 3e année consécutive. En quoi cette journée est-elle importante pour votre établissement ?

C'est le premier temps fort de l'année pour sensibiliser les jeunes lycéennes à leur orientation future, leur présenter les métiers d'ingénieur.e et de technicien.ne et leur dire qu'ils sont autant ouverts à aux filles qu'aux garçons ! Rien ne leur est interdit sous prétexte que ce sont des filles. Toutes les voies sont possibles.

Comment se déroule la manifestation concrètement ?

Dans mon lycée, nous avons ciblé les filles en classe de Seconde car elles vont devoir choisir leurs spécialités à la fin de cette année. Après une petite présentation des intervenantes de cette journée, nous organisons des tables rondes par groupes de 10 environ, avec une femme ingénieure ou technicienne. En cercle restreint, la parole est plus facile et il y a de véritables échanges avec les intervenantes. Les jeunes filles sont souvent beaucoup plus timides que les garçons quand il s'agit de parler de leur avenir et elles ont besoin d'être en confiance. Ensuite, nous faisons un bilan collectif et c'est toujours intéressant de voir que la parole s'est libérée !

Retour sur l'édition 2017

Françoise : "Les filles ont énormément besoin d'encouragements"

Avez-vous une anecdote à nous partager sur une intervention lors des éditions précédentes ? Un retour marquant de l'une de vos élèves à la suite d'un témoignage ?

Françoise Garlet avant les SI au Féminin 2018 : L'an dernier, une jeune femme développeuse racontait que ses parents n'avaient pas voulu qu'elle se dirige vers le métier d'ingénieur.e car elle n'en était soi-disant pas capable (puisque fille...). Elle a dans un premier temps renoncé à son projet. Puis, elle a décidé de suivre des cours du soir pour finir par obtenir le diplôme souhaité. Une jeune fille s'est alors exclamée : « Moi aussi, on m'a dit au collège que ce n'était pas fait pour les filles ! Mais alors, ce n'est pas vrai ? On peut aussi réussir ? »

Quand je parle avec mes élèves de leur orientation future, je suis toujours très étonnée de voir que la grande majorité des filles se met des barrières en se disant : « J'aimerais faire cela mais je pense que je n'en suis pas capable ». Elles ont énormément besoin d'encouragements.

Qu'attendez-vous des intervenantes – femmes ingénieures et techniciennes – qui se déplacent dans les établissements pour témoigner ?

Je suis à chaque fois émerveillée par l'engagement, la présence solaire de ces marraines, qui donnent de leur temps pour faire partager leur enthousiasme d'exercer leur métier ! Si je n'aimais pas tant mon métier d'enseignante, j'en changerais rien qu'en les écoutant ! Par rapport à mes attentes, je ne leur demande que d'être elles-mêmes et je les remercie pour leur participation. Leur action est vraiment très importante !

>> Sciences de l'Ingénieur au Féminin 2018 : La journée s'étend à l'international

Françoise : "Mettre des visages sur des métiers et imaginer que c'est possible aussi pour elles"

La grande nouveauté de cette édition 2018 est la présence d'intervenants ingénieurs et techniciens, sensibles aux sujets de mixité et de féminisation des équipes. pour la première fois, ils vont pouvoir intervenir aux côtés des intervenantes. Pourquoi était-il important d'ouvrir cette journée aux hommes ?

Nous militons pour la mixité, donc rien de plus naturel que d'ouvrir la participation de cette journée aux hommes. Beaucoup d'entre eux s'engagent déjà et plusieurs professeurs des Sciences de l'ingénieur au lycée travaillent activement à mes côtés pour persuader les filles que ces filières leur sont grandes ouvertes.

Avez-vous un message à faire passer aux intervenant.e.s qui ne se sont pas encore inscrit.e.s pour participer à cette 6e édition des Sciences de l'Ingénieur au féminin, le 29 novembre, dans 300 établissements scolaires ?

Votre témoignage a un impact très important ! Grâce à vous, les filles mettent des visages sur des métiers. Elles comprennent combien le métier d'ingénieur est varié et ouvre des tas de possibilités. Et cela vaut pour toutes les séances d'orientation ! Nous avons besoin de vous dans nos établissements scolaires car vous donnez du poids et une réalité à nos mots ! Alors, n'hésitez pas, car il y a encore beaucoup à faire pour changer les mentalités !

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Les Sciences de l'Ingénieur au Féminin est une journée co-organisée avec l'UPSTI, sous le haut patronage du Ministère de l'Education nationale.

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